dimanche 4 novembre 2012

Acharnement Mathieu Larnaudie Actes Sud

Si vous voulez tout connaître de la conjugaison à l'imparfait du subjonctif, vous avez au moins deux possibilités. Soit vous achetez un Bacherelle (orthographe non certifiée), soit vous lisez Acharnement, tant ce temps rare de la conjugaison semble être pour l'auteur, le comble du raffinement. Acharnement raconte la vie de Müller, qui a écrit des discours pour un ministre et qui s'est retiré de la vie politique. Depuis sa luxueuse retraire, il continue d' écrire car le misanthrope, loin de la compagnie des hommes, continue de suivre de loin l'actualité, en ayant pour seule compagnie son jardinier. Or, la propriété dudit Müller est traversé par une sorte de viaduc, d'où les habitants viennent se suicider et troubler quelque peu la quiétude de l'ex écrivain de l'ombre. Disons le d'emblée, ce roman m'a beaucoup fait penser au film l'exercice du pouvoir, qui fut loué par de nombreux critiques et me laissa relativement indifférent. Je n'exclus pas que le peu d'intérêt pour l'un ou l'autre résulte du fait que je connaisse un tout petit peu le monde politique et qu'ils ne m'aient rien appris. Ceci dit, Acharnement m'a semblé pire qu'un mauvais livre : c'est un livre vain, un exercice formel, où le narrateur prend un plaisir à enfiler les subjonctifs de l'imparfait, pour nous montrer qu'il est un homme cultivé, à l'heure où la langue politique est envahie d'éléments de langage. « il comprendrait que, même si l'issue des élections ne faisait aucun doute, je laissasse l'échéance passer et réservasse ma réponse pour une date ultérieure. » Bonne utilisation de la concordance des temps. Soit. Un critique expliquait que les très longues phrases du récit étaient le contrepoint des petites phrases de la vie politique. Cela m'a semblé un peu court comme projet, même si incontestablement Larnaudie manie plutôt bien un style quelque peu précieux et suranné (une langue contaminée malgré tout de quelques décideurs et autres leaders, sans oublier un échanger utilisé pour dialoguer (p75), autant d'exemple d'expression apriori peu prisé du narrateur qu'il a imaginé et que l'auteur lui prête malgré tout). Car le narrateur passe son temps à reprendre certains termes du monde politico-médiatique, en en soulignant les barbarismes, à coup de « comme on dit » (page 138). On s'occupe comme on peut, la vieillesse est un long naufrage.. Plus désagréable est la méthode qui consiste à faire de gros clins d'oeil connivents avec le lecteur. Ici, c'est l'entourage du précédent président de la République qui est visé. Quelques sous-ministres ou sa famille qui sont décrits de telle manière que le lecteur (de gauche forcément) les reconnaisse et ricane. J'ai tendance à penser que la grande littérature grandit ; le ricanement rapetisse toujours, d'autant qu'il s'agit d'attaques encore plus basses que ceux qu'elle entend viser et que l'auteur n'a même pas le courage de citer (par peur des poursuites judiciaires ???? ) La clé du récit est peut être page 160 « La parole politique n'est jamais, sauf en de très rares exceptions, l'expression d'une singularité autonome » (on se demandera ce qu'est une singularité qui n'est pas autonome au passage). A l'inverse de la création et de la littérature ? Comme disait Claude Lelouch, un autre grand formaliste, « tout ça pour ça ! »

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